Construction immobilière : les objectifs ne sont pas atteints
Bien en deçà de la cible initiale du demi-million de logements, seuls 332.000 habitats sont sortis de terre en 2013
François Hollande a reconnu son échec en ce qui concerne l’inversion de la courbe du chômage en 2013. Mais il promet d’accélérer en 2014. La situation est un peu la même dans le domaine clé du logement qui a vu le gouvernement promettre beaucoup… et ne pas réaliser assez.
Malgré ses efforts, la construction de logements neufs en France a en effet continué de décliner l’année dernière. Les mises en chantier de logements neufs en France ont reculé de 4,2% en 2013 comparé à l’année précédente – déjà mauvaise – à 331.867, un chiffre inférieur à la moyenne des dix dernières années (de l’ordre de 347.000 logements), selon les statistiques du ministère du Logement publiées mardi.
Un niveau de construction correspondant à la demande
Et la tendance s’est dégradée en fin d’année, puisque les mises en chantier ont chuté de 10,4%, à 85.698 logements produits sur le seul quatrième trimestre, comparé aux trois derniers mois de 2012.
Pour Olivier Eluère, économiste du Crédit Agricole SA, ces chiffres en baisse « ne sont pas vraiment une surprise. Cela tient au fait que le marché immobilier neuf se « corrige » depuis à peu près deux ans: on observe une baisse des ventes de logements neufs chez les promoteurs, et une remontée des encours de logements invendus. Il est donc assez logique que cela se répercute dans les chiffres de la construction », explique-t-il.
« Il s’agit d’un marché relativement équilibré, qui s’ajuste un peu parce qu’on est dans un contexte économique fragile. Il faut rappeler que le marché immobilier a connu un boom très marqué de 2000 à 2012, avec un creux en 2008/2009 », souligne l’économiste.
« Cette demande plus faible est liée avant tout à la situation économique, au fait que la croissance reste très modérée et que le chômage demeure à des niveaux élevés. Elle est liée aussi à des niveaux de prix élevés et aux mesures de resserrement fiscal » qui ont découragé une partie des investisseurs, qui achètent pour louer, note M. Eluère.
Quels facteurs de rebond?
Toutefois, un abattement exceptionnel (depuis l’été 2013, jusqu’à août 2014) de 25% sur les plus-values de cessions de résidences secondaires pourrait avoir des effets positifs, dit-il.
De son côté, Bruno Heitz, économiste à la Société Générale, se dit « surpris par la résistance » du marché immobilier, dans un contexte très défavorable, mais ne distingue pas de véritable « facteur de rebond en 2014 ».
« J’ai du mal à voir ce moteur de l’économie redémarrer tant que l’environnement global ne connaîtra pas une reprise plus affermie, car les incertitudes sur l’avenir – celles des ménages, quant à leurs revenus, et celles des investisseurs, quant à la capacité des locataires à payer le loyer – demeurent un frein majeur », analyse-t-il.
Selon la dernière étude trimestrielle de l’Insee, les promoteurs ont été plus nombreux à indiquer une augmentation de leur stock de logements invendus, ces dernières semaines.
Ce recul de la demande est aussi lié au niveau élevé des prix de l’immobilier neuf: de plus en plus prudents, les promoteurs lancent moins de programmes, par crainte d’avoir du mal à les commercialiser, souligne le Crédit Foncier.
Ainsi les prix de revient – coût du foncier, coût de la construction et coût des honoraires – ont-ils augmenté de plus de 28% en Ile-de-France entre 2005 et 2011, et de 55% en dehors, indique cette source.
Toutefois, les niveaux historiquement bas des taux d’emprunt, aux alentours de 3%, compensent en partie le haut niveau des prix en solvabilisant les ménages, qui empruntent davantage, à moindre coût. Ces taux devraient cependant remonter légèrement cette année.
Politique volontariste
De son côté, le ministère du Logement estime avoir ces derniers mois engagé une « politique volontariste » de la construction visant à « assainir le marché pour relancer le secteur de façon durable », tout en maîtrisant les prix.
Moteur de cette relance, le secteur du logement social, auquel un taux de TVA à 5,5% a été consenti, s’est vu fixer l’objectif de 150.000 logements construits par an, mais il n’en a produit que 117.000 en 2013 (+14% sur un an).
Enfin, le dispositif fiscal dit « Duflot » – qui a succédé au Scellier, offrant des avantages assortis de conditions plus strictes – a connu un démarrage très progressif et devrait monter en puissance.
Mais pour les mois à venir, le contexte économique toujours très morose, le niveau élevé du chômage, et la cherté des prix, conjugués à la remontée attendue des taux d’intérêt, qui se répercuteront sur les taux de crédits immobiliers, n’incitent pas les observateurs à l’optimisme.